 |  | Date de sortie française : 17 octobre 2001 |  | |
1958, Alain Resnais tourne au Japon "Hiroshima mon amour", sur un
texte de Marguerite Duras. Une française
y rencontrait un japonais dans la ville qui avait été bombardée
13 ans auparavant. Ces personnages si éloignés, étaient
pourtant très proches, chacun ayant perdu beaucoup dans la guerre...
2001, Nobuhiro Suwa veut tourner un remake de "Hiroshima mon amour" avec Béatrice Dalle dans le
rôle de la française Il tente une approche fidèle
au texte de duras et à la mise
en scène de Resnais. Aidé
par un ami écrivain, le réalisateur s'interroge... peut
on tourner un film 40 après sans avoir le même vécu
des personnages de l'époque (ni N. Suwa,
originaire de Hiroshima ni Béatrice Dalle n'ont connu la guerre, contrairement à Resnais et son équipe). D'ailleurs Béatrice
Dalle bloque sur le texte, incapable de jouer une scène.
Elle part alors vivre une aventure malgré la barrière du
langage avec un acteur japonais du film.
En lieu et place du remake fidèle c'est finalement un film moderne
qui s'installe après une scène au bord de la mer (les vagues
ne nettoient pas uniquement la plage...). Cette 2ème partie peu
être perçue comme une autre adaptation de "Hiroshima
mon amour", très libre et moderne, une histoire entre
une actrice française et un homologue japonais...
Voilà pour la trame de H Story, mais le film n'est pas
aussi simple que cela... Nobuhiro Suwa manipule le spectateur. Dans la 1ere partie du film, les frontières
entre le film et le tournage sont perméables (de temps en temps,
on voit un clap, ou encore un nuancier de niveau de gris : le tournage
se fait donc fidèlement en noir et blanc...). On passe de la scène
rejouée au tournage du film en restant dans la continuité
sur la même caméra. On entend alors le réalisateur
et son équipe hors champ. D'autres scènes ne sont plus des
remakes mais le tournage filmé.
Rajoutez à ceci des moments magiques, où N.
Suwa coupe le son, et inversement ne laissant que les dialogues
sur un écran noir. Le spectateur flotte alors au dessus du film
et imagine son histoire.
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Nobuhiro Suwa |
Il faut véritablement s'abandonner et oublier tout ce que vous
avez vu au cinéma en regardant H Story, ce film est un véritable O.C.N.I. (Objet Cinématographique Non
identifié). C'est un mélange de documentaire (sur le tournage
d'un film), de fiction et d'expérimentation, une uvre sur
le langage universel du cinéma. L'équipe franco-nippone
(N. Suwa est assisté de Caroline
Champetier en tête chef opératrice de Claire
Denis) communiquent mieux par le cinéma qu'à
travers la traductrice. Le réalisateur place le spectateur dans
ce rapport, au dessus du langage en rendant des dialogues peu audibles
...
Le titre H Story est comme "d/uo" et "m/other",
ses 2 premiers films, un mot fractionné, il renvoit à Hiroshima
story mais aussi History... H Story est aussi un manifeste contre
un remake de l'histoire du XXème siècle au XXIème...
Le travail de N. Suwa est passionnant,
sa vision unique. Aborder H Story n'est pas des plus facile (comme
je vous disais, il faut s'abandonner), mais croyez moi vos efforts seront
récompensés. Comme le déclarait Caroline
Champetier en ouverture de la projection, elle avait été
fascinée par M/Other (qu'elle avait projeté à
Cannes en 1999...), elle n'a pas hésité à partir
de nombreuses semaines au Japon pour ce tournage, et son sacrifice en
valait la peine...

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