 Collectif - Ethique ? (Drozophile, Suisse, 2006)
Plutôt que de traduire "thinking ethics", une
réflexion issue de débats, répartie
en cinq domaines, la consultante Beth Krasna a fait appel à cinq
auteurs genevois pour une version française
dessinée.
Chacun s'est donc vu attribuer un domaine :
Nadia Raviscioni nous
livre sa vision de la performance et lexique, à savoir si la performance
ne se situe pas dans le long terme...
La conscience est le thème de Wazem, illustré par
Mr Smith, un bonhomme (cousin graphique de l'inspecteur Moroni de Guy Delisle)
rempli de bons sentiments... problème il n'a pas toujours conscience de
ses actions, pas toujours bonnes...
C'est un discours entre un personnage et sa mauvaise
conscience incarnée par un petit ange diabolique (ou diable angelot)
qu'utilise
Tom Tirabosco pour
nous parler de désobéissance...
Isabelle Pralong avait
pour mission d'illustrer éthique et direct, elle présente les dérives
d'un blog au départ
flatteur qui devient ravageur...
Le pasticheur genevois (voir son personnage Zinzin...),
Exem se voit confier le domaine de la connaissance. Des animaux (aux noms pastichés
: Soft Bill, Volartis...) se disputent la découverte de l'étang
magique.
L'éthique est un thème à la mode, des conseillers vendent
grassement des expertises aux sociétés en mal d'image... Mais
ce livre présente bien le sujet dans sa complexité et sa globalité et
pose des questions (ne pas oublier le '?' du titre !) .
L'aborder avec les cinq histoires et les cinq regards différents permet
aussi de mettre cette fameuse éthique en situation. Voilà un collectif
passionnant que nous livre le Drozophile, en bousculant les habitudes
puisqu'il est imprimé en offset, mais la couleur et la fabrication restent éthique ! [09 Juin 06, Jean-Marc] 
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 Hope Larson - Gray horses (Oni press, USA, 2006)
Noémie quitte la France pour
étudier les Arts en Indiana, à Onion City,
ville jumelée à sa ville de Dijon. Elle
emménage dans un petit appartement sur Montpelier avenue.
Elle fait la connaissance de Anna à l'univesrité. Anna vit
près de chez elle, au-dessus de la boulangerie familiale. Le jour,
Noémie découvre son nouvel environnement,
elle croise souvent un mystérieux photographe. La
nuit, elle devient le cheval du papier peint de sa chambre, ce cheval
vient à l'aide de Marcy, une petite fille qui fuit un
incendie...
Dans ce 2e. ouvrage, rêve et
réalité interagissent,
révèlent et construisent le destin de
Noémie. Hope
Larson nous parle également du
dépaysement. Elle respecte la langue
utilisée par Noémie : anglais pour communiquer ;
français dans ses pensées et ses rêves
(avec dans ce cas, la traduction en double [nb : une
traduction assurée en partie par Mr. Hinah...]).
Comme dans 'Salamender's dream', le lecteur
sent les éléments (le soleil, le froid, le vent,
le bruit d'une fontaine...) par des indications visuelles ou par des
onomatopées. 'Gray horses'
est publié en bichromie, orange pâle et noir (et mauve pour la
couverture nocturne), des plus réussi. Hope Larson
maîtrise l'art de son récit, conjuguant onirisme
et réalité avec un dessin qui respire ses propos.
A vous de chevaucher ce 'Grey horses', et de savoir s'il influencera
vos rêves. C'est aussi une très bonne occasion pour ceux qui seraient
frileux à
l'idée de lire un ouvrage en anglais de
franchir le pas .
[31 Mai 06, Jean-Marc] 
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 Pierre Maurel - Michel (Employé du moi (l'), France, 2006)
Michel, reporter radio, vient de recevoir un
courrier de licenciement de la radio qui l'employait. Il continue tout de même
ce qui est sa passion : collecter et assembler des sons et des interviews pour
des reportages radio où il reste seul maître à bord. Pour
cela, il doit accepter des petits boulots d'intérim, où ironie
de la vie il se retrouve manutentionnaire de matériel sonore, jusqu'à décrocher
un poste fixe, vendeur de ce même genre de matériel. Il doit puiser
au plus profond de lui-même pour trouver l'énergie nécessaire à son
reportage radio...
Pierre Maurel nous présente
un personnage dans la difficulté de
vivre sa passion. Michel nous parle aussi du monde du travail (et
du non-travail), chose rare dans la bande dessinée, sujet que le
dessinateur avait déjà abordé
dans 'Buck' (6 pieds sous terre, 2005). Le dessinateur maîtrise
très bien le rythme de son récit et fait rentrer le son dans son
dessin. Le lecteur est plongé dans l'univers sonore de Michel...
Il revient à la réalité en même temps, souvent brutalement
par la sonnerie du portable... (Ironiquement 'born to be alive'). Le
livre est autant à regarder, à lire
qu'à écouter, tout ceci pour un prix très amical, publié dans
la collection 'pour soi' de l'employé du moi. [25 Mai 06, Jean-Marc] 
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 Nadja - Comment ça se fait (Cornélius (éditions), France, 2006)
Nadja est bien connue
dans l'illustration pour la jeunesse avec de nombreux ouvrages, parmi lesquels
'chien bleu'. En adaptant une nouvelle de Henry James,
dans 'le menteur' (Denoël), et avec d'autres ouvrages chez Cornélius ('comment
faire des livres pour les enfants', 'celles que j'ai pas fumées'),
elle entre dans le milieu de la bande dessinée 'adulte'. Elle change
de format en passant de la petite taille des ouvrages 'Raoul' à
la plus grande collection 'Pierre'.
Les caractères de ce roman graphique sont tous
des ours vivant en milieu urbain. Nos plantigrades évoluent dans la sphère
artistique, et le personnage principal (N., son nom n'est évoqué que
dans la dernière case...) fait
de la peinture qu'elle entasse dans son atelier. Un de ses amis, Paul lui propose
de lui écrire un scénario pour un film avec quelques idées
de bases qui vont la poursuivre jusque dans ses rêves. Faut-il écrire
ce scénario ? Faut-il démarcher les galeries ? Faut-il se plonger
dans la réalité pour peindre ? Faut-il exposer pour être peintre
? ... 'Comment ça se fait' que les personnages plantigrades
se posent ce genre de question ou plutôt 'comment ça se fait' que
l'on se les pose, car sous le caractère entomologiste de l'histoire, c'est
bien de la nature humaine dont il s'agit et de questions existentielles.
Au niveau graphique, on devine les coups de pinceau
(de pattes ?) de gouache dans le dessin. On apprend dans la biographie présentée
dans un rabat de couverture, que Nadja peint également...
et l'on peut se demander s'il ne s'agit pas d'une mise en abyme de l'auteur.
Où se
trouvent les frontières
de la fiction et de l'autobiographie... mais toute oeuvre artistique ne contient-elle
pas une part autobiographique ; voilà encore
une nouvelle question ! À vous d'y répondre en compagnie de ces
ours. [17 Mai 06, Jean-Marc] 
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