Hayao Miyazaki - Le château ambulant (Ghibli studio, Japon, 2004)
Adapté d'un roman anglais de Diana Wynne Jones, "le château ambulant" reprend tout l'univers imaginaire de Hayao Miyazaki, naturaliste, et baroque (une ville au style hollandais du XIXème, comme dans "Kiki la sorcière" où accostent des bateaux de guerre au style futuriste). L'écran déborde de couleurs pour le régal du spectateur (sans lui nuire [cf une déclaration de Tati ...]). Le film contient les thèmes récurrents de Miyazaki, la métamorphose, le double, des enfants seuls et responsables, ainsi que l'amour salvateur. On retrouve également des éléments graphiques d'anciennes de ses oeuvres (les machines volantes proches de celles de "Porco Rosso" ou du "Château dans le ciel", les monstres gluants et visqueux de "Chihiro"...). Miyazaki puise aussi dans le monde de l'animation japonaise, le personnage de Hauru a un petit air d'Albator... C'est aussi un maître dans l'art de la récupération, à l'image du château ambulant, assemblage de bric et de broc (un croisement entre une sculpture de Jean Tinguely et de Jan Svankmajer). Joe Hisaishi (auteur des bandes sons des Kitano) signe de nouveau la musique de cette fresque visuelle animée. Malgré toutes ses analogies, Miyazaki livre une nouvelle oeuvre originale. Le film surprendra ses fidèles spectateurs, petits et moins petits avec qui il partage sa flamme intacte!
A noter jusqu'au 13 mars, une exposition Miyazaki
- Moebius à la Monnaie de
Paris. [18 Janv. 05, Jean-Marc]
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Pablo Trapero - Voyage en famille (Océan films, Argentine, 2004) Lors de son 84ème anniversaire, Emilia déclare
vouloir assister au mariage d'une nièce à l'autre bout du pays, sa région natale.
Toute la famille (ses deux filles, les maris et les petits enfant) s'entasse
dans un Vicking 1958 (un pick-up transformé en camping car). Et l'équipée quitte
Buneos Aeres direction Misiones, 1200 kms au nord, à la frontière brésilienne. Les
histoires de famille embarquent également à bord du vieux véhicule. Si ce dernier
n'avance pas très vite (à peine plus vite que la tondeuse de "une
histoire vraie"
de David Lynch, autre voyage à caractère familiale...) et doit subir quelques
réparations (avec la débrouillardise sud-américaine), il avance toujours ...
C'est la leçon de ce voyage ...
Pablo Trapero ne s'enferme pas dans
un genre cinématographique, aucun de ses 3 films ne ressemble au précédent. Montage
haché, quelques plans purement "graphiques" et une caméra instable au début
du voyage pour devenir plus posée à l'arrivée définissent le style de cette comédie.
Une comédie qui s'amuse de la famille, une vraie comédie à l'italienne signé Trapero ! [12 Janv. 05, Jean-Marc]
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Benoît Jacquot - A tout de suite (France, 2004)
Une étudiante aux Beaux-Arts (Isild le Besco) rompt avec un amour étudiant. Avec sa copine qui partage clandestinement la chambre de l'appartement bourgeois qu'elle occupe avec son père divorcé et sa soeur, elle rencontre le soir même un maghrébin (Ouassini Embarek), voyou de Belleville et connaît le coup de foudre. Le voyou passe au gangstérisme en braquant une banque et la jeune fille quitte tout pour le suivre dans sa cavale. Ils partiront avec un complice et sa compagne (une autre "voyoute") pour le Sud, l'Espagne, le Maroc. Après l'insouciance vient le temps de la méfiance et de la traque. La peur s'installe, et elle pose alors la question d'une éventuelle séparation. L'éventualité deviendra réalité à la douane grecque. Lui la perdra alors démunie dans une ville sans repères.
Benoît Jacquot adapte une histoire vraie qu'il a découvert dans une émission télévisée. Il filme l'essentiel allant au plus proche du personnage principal et de ses émotions. Ils n'ont pas de prénoms. 'A tout de suite' est l'histoire de "elle et lui", puis de "elle sans lui". Ce film tourné avec une économie de moyens en noir et blanc (en DV, également bien pratique pour raccorder des images d'époque [1975]) a été vécu comme pour un 1er film déclare Benoît Jacquot (cf les Cahiers du Cinéma n°596). Il renouvelle aussi le genre de la cavale amoureuse (comme 'Roberto Succo' avec la même actrice) en restant avec "elle". [05 Janv. 05, Jean-Marc]
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André Téchiné - Les temps qui changent (France, 2004)
Les personnages des "temps qui changent" se cachent tous derrière une fausse façade pour masquer leurs soucis existentiels. A Tanger, Cécile (C. Deneuve) anime une émission de dédicaces à la radio mais ne communique plus avec son mari médecin (qui lui se réfugie dans sa piscine quand ce n'est pas avec l'alcool), ni avec son fils qu'elle accueille à l'aéroport avec sa compagne Nadia (Lubna Azabal). Lui cherchera à voir Bilal, son jeune amant tangérois dans la maison (véritable forteresse) qu'il garde à l'année. Nadia veut rencontrer sa soeur jumelle malgré le fossé qui les sépare (l'une mère célibataire toxicomane, l'autre ancrée dans la religion et ses traditions). Les candidats à l'immigration en Europe se cachent eux dans la forêt en attendant leur départ clandestin. Seul Antoine (G. Depardieu) déclare clairement ses intentions. Il vient d'obtenir sa mutation à Tanger comme responsable d'un vaste chantier. Il retrouve Cécile son premier (et seul) amour 30 ans après et lui annonce qu'il est déterminé à regagner son coeur...
André Téchiné retourne à Tanger (voir 'Loin') et réunit deux monstres du cinéma français pas si souvent à la même affiche (la dernière fois remonte à 1988 avec F. Dupeyron, mais on se souviendra plus du 'dernier métro' de François Truffaut en 1980). Cette affiche ne répond pas à une logique de production "commerciale" (ce n'est pas le genre de la maison Paulo Branco), mais renforce l'histoire du film. Il faut également dire que C. Deneuve était restée fidèle à Téchiné qui lui même n'est pas du genre infidèle (on retrouve à l'écran Lubna Azabal [loin] et à l'écriture un compagnon de longue date Pascal Bonitzer).
Alors un premier amour peut-il devenir un dernier amour? comme questionne l'affiche... [31 Dec. 04, Jean-Marc]
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