 Younn Locard - H27 (Employé du moi (l'), Belgique, 2009)
Yves rentre de Chine pour
rejoindre ses colocataires et amis dessinateurs à Bruxelles.
Après quelques signes inquiétants
(l'élection de Sarkosy en France, euh la
disparition mystérieuse d'oiseaux), le chaos envahit la
capitale belge, touchée par un virus, le ‘H27’
...
Habilement, l'auteur nous glisse vers le drame,
vers l'horreur. Partant d'une réalité
concrète, les élections
présidentielles françaises de 2007, l'intrusion
du virus nous paraît du coup très concret,
renforcé par l'actuel H1N1. Ce dernier n'était
pas encore présent lorsque Younn
Locard a commencé son
récit en octobre 2007, il s'agissait alors du SRASS qui
avait sévi en Asie (d'où rentre Yves).
‘H27’ se
révèle être un scénario
catastrophe, mais une catastrophe (de plus en plus) plausible. ‘H27’
nous donne à réfléchir
également sur la réaction de groupe ; la
solidarité du collectif de dessinateur
s'émiette avec l'épidémie. Un autre
thème tourne autour de la réaction de
nos gouvernements (celui-ci quitte la capitale pour Anvers, comme dans ‘les
derniers jours du monde’ des frères
Larrieu dans la même
thématique, plus apocalyptique) et de la presse.
‘H27’
avait été publié sur les deux ans de
sa gestation sur GrandPapier et se
matérialise désormais,
agrémenté de quelques passages. Younn Locard,
diplomé de l'école de dessin de Saint-Luc
(Bruxelles) utilise un dessin noir et blanc vif et spontané,
proche d'un carnet (pas de cases représentées,
quelques bulles, mais le plus souvent des commentaires). Avec
différents styles, un trait fin, des hachures ou encore des
parties au lavis, on pourra juste regretter les différences
graphiques des personnages au fil du récit (pas facile de
garder une constance sur deux ans). Mieux que l'actualité
des journaux, ‘H27’
vous ouvrira plus l'esprit, sauf pour les hypocondriaques qui
doivent passer leur chemin.
[25 Oct. 09, Jean-Marc] 
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 Frederik Peeters - Pachyderme (Gallimard, Suisse, 2009)
En 2001, Frederik
Peeters introduisait dans ‘pilules
bleues’, un élément hors
réel dans un récit autobiographique, un mammouth.
Huit ans plus tard, c'est un éléphant qui ouvre
cette fiction baptisée ‘pachyderme’.
L'animal bloque une route dans la campagne genevoise des
années 50. Clarice Sorrel emprunte alors
des chemins détournés pour voir son mari
diplomate récemment hospitalisé, un chemin
semé de drôles de personnages, comme un chirurgien
coureur de jupons, sa jeune élève aux cours de
piano ainsi que d'autres totalement surréalistes (des
bébés mi-foetus mi-hommes, un agent secret tout
mou ...). Comme l'éléphant bloquait la
circulation, un caillot de sang obstrue
la mémoire d'un personnage ... "j'ai la mémoire
[d'éléphant] qui flanche, je ne me
souviens plus de rien " ...
L'étrange arrive progressivement, par un
berger aveugle, puis de porte en porte à
l'hôpital, il
envahit le récit pour la plus grande perte du lecteur. Dans
ce nouvel exercice, Frederik
Peeters explore de nouvelles voies,
après l'autobio., le western, la science-fiction, le
policier (‘RG’ ne
connaîtra pas de 3e. pour divergence de points de vue avec
son co-auteur des RG ... ). Le voici dans un entre-deux (entre
réel et fantastique), une atmosphère que l'on
trouvait dans ‘la fin du monde’ de son camarade Tirabosco,
ou que ne renierait pas David
Lynch. On retrouve des personnages tout droit
sortis du Hollywood des années 50/60. Un vrai
régal de voir tomber Clarice (une figure
récurrente chez le dessinateur genevois), même si
l'on quitte trop explicitement l'étrange à la fin
...
[04 Oct. 09, Jean-Marc] 
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 S. Doubinsky | EM | Profondo Rosso - Jours de lumière (Homecooking, France, 2009)
Billy Sherman prend la fuite après avoir
abattu sa femme et son amant, l'ami Jeff. Lors de sa cavale, il se souvient
de son passé avec
Susan, et décharge sa colère comme le fait l'orage avec
la foudre ...
On doit cette nouvelle, road-movie tumultueux et sanglant
à Sébastien Doubinsky.
Cet écrivain né à Paris a passé une
longue partie de son enfance aux USA d'où il tire des influences littéraires,
comme le roman noir. Il vit actuellement au pays de sa femme danoise. ‘Jours
de lumière’ a été écrit en langue
anglaise avant d'être traduit en français par l'écrivain.
Mais ‘jours de lumière’
n'est pas seulement une nouvelle rythmée en 51 coups de tonnerre, l'ouvrage
est illustré par
des dessins de EM (Eric Mahé) et
une bande-son de Profondo
Rosso,
des compléments
rénnais. EM (initiateur de la revue ‘dessins’ à la
Chose) ne
transcrit pas littéralement
le texte privilégiant
plus son imagination et celle du lecteur. Certains dessins sont si noirs que
l'on pensera aux cartes à gratter de Thomas
Ott. On pensera d'ailleurs
à la
‘soupe aux poulets’ de Ed McBain que le Suisse avait illustré pour
les éditions Desmoures.
Le groupe Profondo
Rosso accompagne la chevauchée motorisée
de
Billy Sherman, ainsi que ses états d'âme avec des ballades
instrumentales, entre calme (de la tempête) et déchaînement
des éléments. Le groupe fait à cette occasion une tournée
des librairies (à Paris, le 7 juillet au Monte en l'air, le 8 chez Philippe
le libraire, voir les autres dates sur le site
du groupe)
On doit cet ouvrage à lire, à regarder et à écouter
aux nouvelles éditions rénnaises Homecooking.
On connaissait le roman ou la nouvelle illustrée (comme la collection
du même nom chez Futuropolis avec entre autres un Orson
Welles
/ Tardi,
Ed McBain / Gotting, Vilar
/ Baudoin ... ), la
bande dessinée
liée à une
oeuvre musicale (les collaborations de Baladi avec Ghostape et
Brice Catherin dans
la collection Morceau de la Cafetière), ‘jours
de lumière’
ajoute une troisième dimension.
[06 Juil. 09, Jean-Marc] 
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 Gabrielle Bell - Cecil and Jordan in New York stories (Drawn & Quarterly, USA, 2009)
Gabrielle Bell participe à de nombreux collectifs, comme la revue ‘Mome’ de Fantagraphics (elle signait la couverture du 1e numéro), l'anthologie ‘Kramer's Ergot’ chez Buenaventura Press ou encore ‘D+Q Showcase’ de l'éditeur anglophone de Montréal, Drawn & Quarterly. Elle y développe des histoires plus ou moins auto-fictionnelles (des fictions teintées d'autobiographie). Parfois l'autobiographie prend le dessus, comme dans ‘Lucky’, une série de comic, regroupé dans un volume (un 2e. est prévu). Comme ce présent ouvrage, cela reste en version originale, signalons que l'An 2 avait traduit en français un recueil, ‘quand je serai vieille et autres histoires’.
‘Cecil and Jordan in New York stories’ reprend des nouvelles graphiques parues dans les collectifs pré-cités, dans un registre plus fictionnel, tout en conservant un certain degré d'autobiographie . Gabrielle Bell est devenue new-yorkaise récemment, pour suivre son compagnon, après avoir résidé à San Fransisco. Cette même nouvelle, fantastique (une personne devient une chaise vivre sans ennuyer son entourage) a été utilisé par Michel Gondry dans son segment ‘interior design’ du film collectif ‘Tokyo !’. D'autres histoires nous entraînent dans le milieu de l'Art, en partant d'une école (comme ‘Art school confidential’ de Daniel Clowes, adaptée par Terry Zwigoff’ au cinéma).
Gabrielle Bell affectionne les histoires traitants de l'enfance, de l'adolescence et du rapport à l'autre. Son trait devient plus affirmé, plus mûr, avec dans ce recueil différentes techniques : couleurs (à l'huile ou aquarelle), bichromie et encre de chine. Gabrielle Bell confirme son talent pour poser des atmosphères sur des récits courts, l'ensemble (au-delà de ‘Cecil and Jordan …’) pouvant constituer une grande histoire aux multiples personnages. [15 Juin 09, Jean-Marc] 
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