Du capitaine
Achab
de Herman Melville,
on ne connaît que sa fin tragique face au cachalot blanc, Moby
Dick. Le cinéaste Philippe
Ramos imagine le parcours entier de ce
personnage, de sa naissance jusqu'à son combat final, en
dehors d'une
adaptation du roman de Melville comme l'avait fait John Huston
ou Denis Deprez en
bande dessinée. Trois chapitres sont consacrés
à son enfance, sa naissance dans les forêts du
Massachusetts, sa mère mourant à son
accouchement, le séjour chez sa tante très
pieuse, chez son père alcoolique (Jean-François
Stévenin) avec son amie Louise,
son retour chez sa tante mariée à Henry
(Philippe Katerine)
puis sa fuite sur l'île du Nantucket, aux bord
de l'océan, recueilli par le pasteur Mulligan. On
retrouve
le capitaine Achab devenu adulte
(Denis Lavant)
et à sa réputation de marin chasseur de baleines aguerri dans les deux
derniers chapitres. Il est retrouvé blessé
et secouru par une blanchisseuse Anna (Dominique Blanc).
Dans le dernier épisode, ‘Starbuck’,
du nom du second du baleinier (Jacques
Bonnafé), Philippe
Ramos raccorde son capitaine Achab
au récit de Melville.
Philippe
Ramos construit son capitaine au fil des
personnages qu'il croise, imagine son destin du ventre de sa
mère à celui du cachalot mythique, de la
forêt à l'océan. Visuellement le film
est très riche, malgré un certain
dépouillement dans la réalisation. Les
décors ne sont pas nombreux (la maison de sa tante, la
cabane de son père, la blanchisserie, l'église),
ils nous viennent du vieux continent (France et Suède) et
pourtant, ils fonctionnent à merveille. Chaque chapitre
s'ouvre sous forme de médaillon, une voix-off nous
accompagne pour le récit, et le réalisateur
utilise différents style de musiques, du traditionnel chant,
"drunken sailor" au "song to the siren"
de Tim Buckley
ici interprété par the
Czars.
Philippe
Ramos nous entraîne dans sa vision du capitaine
Achab, une libre construction en quelque sorte
à partir de l'épisode de Melville,
une construction très solide et convaincante, avec des acteurs
merveilleux (citons également Jean-Paul
Bonnaire, Lou
Castel, et Virgile
Leclaire en jeune Achab). Pour preuve,
le film a remporté deux prix (critique internationale et de
la mise en scène) au festival de Locarno. A noter que le
réalisateur s'était déjà
essayé au même sujet avec un
court-métrage de 22 minutes.
|