"Une tristesse est une joie passée"
: Old Joy.
Kurt (Will
Oldham) est de passage à Portland, il
propose à Mark (Daniel
London), un ami de longue date, une
randonnée en forêt dans les montagnes de l'Oregon.
Le scénario du film peut tenir en cette phrase, mais
cacherait toute sa richesse. Sous une apparence lisse, le film renferme
de nombreux contrastes et oppositions, comme le milieu urbain voire
post-industriel et la nature, la lumière et
l'obscurité, le calme (Kurt
assène ses phrases de "cool man") et la
tension ou encore les différences sociales entre les deux
amis (Kurt voyage sans attaches, Mark
est sédentaire, sa compagne attend un enfant). Mais ces
oppositions ne sont pas si simples que cela, comme dit Kurt,
"la nature est en ville dans les espaces verts et les
déchets sont présents dans la nature", et les
choses ne sont pas aussi tranchées que cela. Prenons la
lumière, elle est filtrée par la
densité de la forêt et la nuit
éclairée par les néons de la ville
lorsque Kurt y déambule. Le point le
plus marquant réside dans la tension sous-jacente entre les
deux amis, portée par les regards, les attitudes. Elle
éclatera un peu plus frontalement lors d'une discution
philosophique (Kurt expose sa théorie de
l'Univers, rien de moins) autour du feu de camp (parmi les ordures). La
tension est omniprésente, même lorsqu'ils
atteignent la source d'eau chaude pour s'y relaxer, sans que celle-ci
déborde, une tension retenue.
Ce petit bijou de 73 minutes est signé Kelly Reichardt,
qui reprend une nouvelle de Jon
Raymond, elle même écrite
sur la base du travail photographique de Justine
Kurland. La réalisatrice
était directrice artistique sur ‘poison’
de Todd Haynes
qui produit ce film, ou encore avec Hal
Hartley sur ‘the unbelievable
truth’ où elle apparaissait d'ailleurs
à l'écran.
La bande son de ‘Old Joy’
a été confiée à Yo
La
Tengo, groupe qui pratique lui aussi la tension
retenue, groupe présent au générique
de ‘the unbelievable truth’ de Hal Hartley
ou encore de ‘Junebug’ de Phil Morrisson,
où Will Oldham
faisait déjà l'acteur ... le monde indie est un
petit monde ! Le chanteur folk de Bonnie
'Prince' Billy, Palace
Brothers, n'en est donc pas à son 1e.
rôle au cinéma.
‘Old Joy’
est une perle inattendue dans la rentrée
cinématographique, on ne regrette que sa sortie
confidentielle, seules 5 copies circulent dans l'hexagone.
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